Chemin de salut
Il a forcé sa clôture comme celle d’un jardin, il a détruit son lieu de rencontre. (Lamentations 2, 6)
Les arts et la culture, la littérature et la poésie servent entre autres à exorciser, par la dramaturgie, les malheurs de l’histoire et de l’âme humaine. L’œuvre d’art sert ainsi parfois de thérapie.
Le livre des Lamentations, comme son nom l’indique, est un recueil de cinq poèmes de complainte et de deuil. Le travail du poète se fait exercice spirituel et transcende les évènements tragiques qui se déroulent sous ses yeux.
Le poète interprète donc la chute de Jérusalem et la destruction du Temple par l’armée babylonienne comme une action du Seigneur. « Il a forcé… » « Il a détruit… » Voir ainsi Dieu à l’œuvre sous les traits du destructeur peut paraître hasardeux, voire choquant. Comment Dieu pourrait-il soutenir l’effort d’un ennemi et orchestrer la calamité qui frappe ?
En discernant le bras du Seigneur, Jérémie dépasse la révolte et le désespoir. Il invite aussi ses lecteurs à revenir au cœur de leur foi au « Dieu Un ». Son processus le pousse ainsi à l’introspection et à l’examen des responsabilités de son peuple. Devant le désastre, il a le courage de ne pas se voir comme une victime. « Réfléchissons à nos voies, examinons-les à fond »[1] appelle-t-il.
Car l’exercice du poète l’a mené au cœur de son être : « Voici à quoi je réfléchis, voici pourquoi j’attends : C’est que la fidélité du Seigneur n’est pas épuisée, que sa compassion n’est pas à son terme ; elle se renouvelle chaque matin. Grande est ta constance ! »[2] La découverte au plus profond de l’être d’une Présence constante à laquelle on peut exprimer sa peine et sa plainte, ouvre sur une Rencontre d’où peut renaître la confiance. « Tu m’as entendu. »[3]
Le retour à Dieu, l’Unique, est toujours chemin de salut.
[1] Lamentations 3, 40
[2] Lamentations 3, 21-23
[3] Lamentations 3, 56