Fonte des neiges…
Mes frères ont trahi comme un torrent, comme le lit des torrents qui s’enfuient. La débâcle des glaces les avait gonflés quand au-dessus d’eux fondaient les neiges. A la saison sèche ils tarissent ; à l’ardeur de l’été ils s’éteignent sur place. (Job 6, 12)
Depuis quelques années, la physionomie de la Grande Doux à Cormoret a changé. Son débit connaît d’importantes variations et il n’est pas rare que ses eaux tarissent en période de sécheresse. Le réchauffement climatique déploie ses effets. Pourtant, ces derniers jours, elle a grossi de façon spectaculaire.
Job, l’homme abattu et souffrant, constate avec dépit que ceux qui se prétendent ses amis et ses frères sont en réalité aussi perfide que les eaux d’un torrent. Pétri de bonnes intentions, leurs bons sentiments se tarissent devant l’ardeur d’une douleur aussi ravageuse qu’un été torride. Les « il faut », « tu devrais », sont aussi décevants qu’une rivière asséchée.
Les recettes apprises, les concepts religieux, les théories explicatives sur le mal, ne pourront jamais apaiser la soif d’un être en détresse. Quelle illusion de croire, comme les amis de Job, qu’à force de beaux discours et de raisonnements pieux, l’homme brisé se relèvera. La réalité est qu’il est seul à pouvoir traverser ses tourments à la rencontre de Son rédempteur vivant (Job 19, 25). La vraie fraternité serait de le reconnaître. Seule une écoute empathique dénuée de tout jugement, de toute tentative d’explication et d’interprétation est soignante. Puis-je offrir simplement ma présence et mon regard aimant à celui qui souffre ? Rien ne sert de me gonfler d’orgueil en prétendant savoir alors que j’ignore tout de sa souffrance.