Image floue
« Aujourd’hui nous voyons au moyen d’un miroir, d’une manière confuse... » (1 Corinthiens 13, 12)
En visitant l’exposition « Flou. Une histoire photographique » au musée de l’Elysée à Lausanne, on découvre la tension qui existe entre les partisans d’une image nette et réaliste et ceux qui préfèrent un certain flou pictural. Au début de la photographie, le réalisme et la vérité crue de l’image dérangeaient.
Le psychiatre Serge Tisseron écrit à ce propos : « Si l’évolution rapide du monde nous rend anxieux, nous allons probablement préférer les images nettes, stables. Si, au contraire, nous sommes angoissés par une certaine rigidité autour de nous (…), nous allons privilégier le mouvement, l’aspiration vers l’avenir ».
L’Évangile, ce Livre de l’intranquillité [1], nous propose une sorte de miroir, une vision indirecte et énigmatique. Il invite à suivre un Jésus complètement humain et vulnérable nous dévoilant le Père tout Amour. L’image est floue, l’énigme demeure. Le Christ est le Fils de l’homme qui « n’a pas où reposer sa tête »[2] ; il marche, se déplace, ose la rencontre avec l’autre ; il est l’intranquille parmi les intranquilles.
Pour être et rester vivant, il faut renoncer à une image trop nette, à une forteresse de certitudes définitives. D’ailleurs dans le Sermon sur la montagne, Jésus utilise à de nombreuses reprises l’expression « Vous avez entendu qu’il a été dit… Mais moi, je vous dis… » C’est en cherchant à accomplir la loi d’Amour que les suiveurs de Jésus sont appelés à avancer.
Dans un monde en évolution, aucun objectif n’est capable de donner une image parfaitement nette. « C’est partiellement que nous connaissons… »[3] Mais « l’Amour ne succombe jamais »[4]. Malgré les flous, continuons à le poursuivre sans relâche.
[1] L’Intranquillité, Marion Muller-Colard, Bayard, 2021
[2] Matthieu 8. 20
[3] 1 Corinthiens 13. 9
[4] V. 8